« Quelle est ma valeur ? »
Vous êtes-vous souvent posé cette question ?

Ce serait rassurant de se dire que notre propre valeur est fixe, mesurable, intangible et durable dans le temps.

Mais il n’en est rien.

La valeur humaine respecte les mêmes lois que dans les modèles économiques. Je peux avoir un produit technologiquement parfait, esthétiquement abouti, aux nombreuses fonctionnalités, mais s’il ne s’achète pas, il n’a pas de valeur.

Eh bien vous, c’est pareil…

Qu’est-ce que ça veut dire, nous ne sommes pourtant pas des produits ?!?
Le point commun, c’est que tout produit a une valeur d’usage, là où nous avons une valeur perçue.
Et puis il y a la valeur que nous nous accordons. Ici, cela renvoie directement à la notion d’estime de soi.
Et parfois, entre l’estime de soi d’un côté et notre valeur perçue de l’autre, c’est, pour certains, un questionnement permanent… et pour d’autres, même pas une préoccupation.

Dans ma carrière de psy, spécialiste des émotions, je croise trois grands types de personnes dont le rapport à la valeur et à l’estime de soi, est très différent.
Il y a les valo-indépendants, les attachés aux valeurs et les valo-dépendants.
Évidemment, nous pouvons être un peu des trois, même si souvent nous avons une dominante.

1. Les valo-indépendants
« Ma valeur ne se joue pas à chaque instant »

Chez les valo-indépendants, le sentiment de valeur personnelle est relativement stable.
Leur estime d’eux-mêmes ne s’effondre pas à chaque critique, ni ne s’envole à chaque compliment. Ils restent ancrés dans le réel : ils regardent les résultats, les retours, les faits, comme des informations, pas comme des verdicts sur leur identité.
Pour eux, la valeur, c’est ce qu’ils réalisent au présent et permet de poser leur légitimité, mais sans confondre :« Là, j’ai échoué » avec « donc je ne vaux plus rien ».

Leurs points forts :
Une résistance élevée : ils apprennent de l’échec sans se démonter complètement.
Une capacité à prendre des risques, essayer, se tromper, ajuster.
Des relations plus apaisées, car ils n’ont pas besoin de prouver en permanence qu’ils valent quelque chose.

Leurs fragilités possibles :
Ils peuvent être perçus comme froids ou distants par des personnes plus sensibles à la reconnaissance.
Ils sous-estiment parfois l’importance de la valeur perçue par les autres (« Je sais ce que je vaux, peu importe ce qu’on pense »).
Ils peuvent avoir du mal à comprendre la souffrance ou la sensibilité de ceux dont la valeur est très fluctuante, parfois même, cela peut représenter un signe de faiblesse à leurs yeux.

Enfin, ils aiment conseiller et représenter la figure de l’autorité.

2. Les attachés aux valeurs
« Ma valeur, c’est ma capacité à rester fidèle à ce qui est important pour moi »

Pour les attachés aux valeurs, la vraie question n’est pas : « Est-ce que j’ai réussi ? », mais : « Est-ce que je suis resté fidèle à ce qui compte pour moi, car c’est ce qui fait ma valeur ! »
Ils vivent avec une boussole intérieure très forte.
Leur valeur n’est pas seulement dans le résultat immédiat, mais dans la cohérence avec un idéal, une mission, des principes.
La valeur, pour eux, c’est vers où ils vont, ce qu’ils cherchent à incarner, ce qu’ils construisent sur le temps long.

Leurs points forts :
Un sens très puissant : ils donnent une direction, une raison d’être aux projets.
Une grande loyauté envers leurs engagements, leurs équipes, leurs causes.
Une capacité à donner une perspective aux épreuves : la difficulté devient parfois partie intégrante de la mission.

Leurs fragilités possibles :
Quand l’écart entre l’idéal et la réalité devient trop grand, ils peuvent basculer dans la culpabilité (« je ne suis pas à la hauteur ») ou la déception chronique.
Ils sont exposés au perfectionnisme moral : ne jamais en faire assez, ne jamais être assez cohérents.
Ils peuvent, au nom de leurs valeurs, s’oublier eux-mêmes et sacrifier leur santé ou leur équilibre.

Pour eux, la valeur n’est pas figée : elle se construit dans le mouvement, dans la trajectoire entre ce qu’ils sont aujourd’hui et ce qu’ils veulent devenir.

Enfin, ils aiment montrer l’exemple et le chemin.

3. Les valo-dépendants
« Ma valeur est en jeu tout le temps »

Chez les valo-dépendants, la valeur personnelle est fortement conditionnelle.
Elle dépend des résultats, des réactions des autres, des signaux faibles, du moindre silence. Chaque situation peut devenir, pour eux, un référendum sur leur valeur.
Ils donnent de la signification à tout : un regard, un courriel sans réponse, une remarque en réunion, un like manquant…
Ils captent intensément les signaux faibles et passent beaucoup de temps à les interpréter.
La valeur, pour eux, c’est ce qu’ils ressentent d’eux-mêmes ici et maintenant.

Leurs points forts :
Une hyper-sensibilité relationnelle : ils perçoivent les ambiances, les tensions, les non-dits.
Une forte capacité d’empathie : ils comprennent finement ce que les autres peuvent ressentir.
Une grande profondeur émotionnelle : ils vivent les choses intensément, ce qui peut nourrir la créativité, la qualité du lien, la présence à l’autre et se résumer parfois par une résilience élevée.

Leurs fragilités possibles :
Leur estime de soi est très fluctuante : un feed-back négatif pèse plus lourd que de nombreux signes de reconnaissance.
Ils ont tendance à sur-interpréter ce qui ne va pas et à minimiser ce qui va bien.
Ils peuvent s’épuiser à essayer de « rattraper » leur valeur en travaillant trop, en cherchant sans cesse l’approbation ou en évitant tout risque d’échec.

Chez eux, la valeur est vécue comme fragile, toujours à confirmer, jamais complètement acquise.

Enfin, ils aiment expliquer les choses et influencer.

Trois façons différentes de jouer la même question
Ces trois profils ne se distinguent pas par le fait d’avoir « plus » ou « moins » de valeur, mais par l’endroit où se joue la bataille intérieure :

Chez les valo-indépendants, la valeur est un levier d'affirmation de sa légitimité.
Chez les attachés aux valeurs, la valeur est une direction.
Chez les valo-dépendants, la valeur est un thermomètre émotionnel.

Et en toile de fond, une réalité commune :

Nous avons tous une valeur intrinsèque, celle de l’être humain, qui ne se négocie pas et qui est relative à l’estime de soi, plus ou moins étayée selon la personne et son histoire.

Nous avons une valeur relationnelle, ce que nous apportons dans et à travers le lien.

Nous avons une valeur perçue, ce que les autres voient, comprennent et reconnaissent en fonction de ce qu’ils sont eux-mêmes.

La question n’est donc peut-être pas : « Combien je vaux ? », mais plutôt :
Où, pour moi, se joue la valeur :
Dans le socle en cet instant ?
Dans la direction que je prends ?
Dans mon ressenti du moment ?

Et pour vous ?